SANS RÉSERVE – 2024
SANS RÉSERVE, le nouveau rendez-vous artistique et festif dédié à la création engagée pour le vivant, imaginé par COAL revient pour…
Le Prix COAL 2020 sur le Vivant a été décerné par un jury d’experts de l’art et de l’écologie à l’artiste Paul Duncombe pour son projet Manicouagan. Une mention spéciale du jury récompense également Le projet Moineaux de l’artiste Éléonore Saintagnan. La cérémonie s’est déroulée en ligne.
Crédit image : Paul Duncombe, Manicouagan, 2015- 2020. Imagerie Satellite © 2020 Planet for the Planet, Skysat, and RapidEye.
Publié le 10 juin 2020
En 2020, le Prix COAL se consacre à l’érosion de la biodiversité. Cette onzième édition s’inscrit dans le programme VIVANT, une Saison culturelle pour la Biodiversité, portée par COAL et ses partenaires en préparation du Congrès mondial de la nature de l’UICN 2020. Les membres du jury ont décerné le Prix COAL 2020 à l’artiste Paul Duncombe pour son projet Manicouagan, du nom d’un cratère formé par la chute d’une météorite il y a 214 millions d’années au Québec. Accompagné d’une équipe pluridisciplinaire, il dresse un portrait artistique de ce territoire reliant ainsi la violence des extinctions de masse et des impacts météoritiques avec les crises actuelles de l’ère anthropocène. Le Jury a également distingué Le projet Moineaux de l’artiste Éléonore Saintagnan qui rend hommage à une espèce commune fortement menacée : le moineau, dont la population mondiale a chuté de 95 % en trente ans.
« La biodiversité a de tout temps inspiré les artistes. Des artistes contemporains le lui rendent bien, en contribuant par leurs œuvres, à la prise de conscience de tous de la nécessité d’agir. Merci à COAL de rendre visible cela » a déclaré Christophe Aubel, Directeur Général Délégué à la mobilisation de la société, Office français de la biodiversité, lors de la délibération du jury.
La sixième extinction de masse qui menace la diversité du vivant touche aussi bien les espèces que les écosystèmes. En France, à l’heure actuelle, 18 % des espèces, soit près d’une espèce sur cinq, sont d’ores et déjà considérées comme éteintes ou menacées. La dernière crise similaire remonte à 65 millions d’années et a signé la disparition des dinosaures.
Contrairement aux cinq précédentes, cette sixième extinction du vivant est provoquée par l’impact des activités humaines. Cinq causes majeures ont été identifiées : le changement d’utilisation des espaces naturels, la surexploitation des espèces, le changement climatique, la pollution et les espèces exotiques envahissantes. La crise sanitaire que le monde traverse actuellement est la conséquence directe de l’exploitation forcenée de la nature par l’homme. Une réaction des pouvoirs publics, du secteur privé, des représentants de la société civile et des citoyens est aujourd’hui urgente pour enrayer le déclin de la diversité du vivant et préserver l’équilibre de nos écosystèmes.
Face à une situation aussi complexe qu’urgente, le Prix COAL 2020 promeut les artistes qui témoignent, imaginent, expérimentent et oeuvrent pour un monde plus respectueux du vivant et de l’équilibre écologique. À travers une grande diversité de propositions et de pratiques, les dix artistes nommés se mobilisent pour rendre compte d’un monde encore vivant, pour sentir et expérimenter la biodiversité, mettre en lumière l’extrême fragilité et l’immense force du vivant, pour agir enfin et contribuer à sa préservation.
« Avec ce prix, le jury encourage un artiste concerné et impliqué. Paul Duncombe envisage la nature comme un sujet au long cours comme en attestent ses différents travaux et installations, et cherche à en rendre compte, en multipliant les angles d’approche, les échelles et les paysages. Son approche transdisciplinaire, son goût pour l’exploration de terrain président à la création d’œuvres ambitieuses mêlant la nature aux nouvelles technologies, mariant sciences, littérature et poésie » a résumé Christine Germain-Donnat, Directrice du musée de la Chasse et de la Nature, membre du jury et partenaire du Prix COAL.
Pour Olivier Lerude, Haut fonctionnaire au Développement durable du ministère de la Culture, également membre du jury, « il était important de choisir comme lauréat du prix COAL un projet dense, brassant des questions complexes, car notre temps incertain nous entraîne tous vers cette complexité : le projet Manicouagan de Paul Duncombe, parce qu’il aborde, dans une démarche artistique et esthétique d’une grande cohérence, le temps long de la vie et de la Terre, est un projet qui nous saisit car il se place au bon endroit. »
Surnommé l’Œil du Québec, le cratère d’impact Manicouagan est l’un des plus grands et des mieux préservés sur Terre. D’un diamètre de 100 km, il s’est formé il y a 214 millions d’années suite à la chute d’une météorite de 8 km. Perdu au milieu du Québec, l’Astroblème, aujourd’hui classé Réserve Mondiale de la Biosphère par l’UNESCO, abrite une faune, une flore et des particularités géologiques uniques. L’origine extra-terrestre de ces reliefs, l’histoire autochtone du territoire et l’engloutissement artificiel de vastes forêts par les eaux, donnent au site une aura mystique.
Paul Duncombe souhaite prolonger à Manicouagan son travail de recherche entrepris depuis 2015 en collaboration avec des naturalistes et des géologues, sur la violence des extinctions de masse et les impacts météoritiques. À partir de prélèvements physiques et numériques réalisés sur place lors d’une expédition en toute autonomie, accompagné d’une équipe pluridisciplinaire, il s’agira de représenter l’ensemble des mécanismes ayant conduit à la reconquête du site par les végétaux, les insectes et autres espèces vivantes, jusqu’aux premières nations. Dans l’esthétique des missions d’exploration spatiales (réelles et fictives), une station électronique artisanale sera déployée dans le cratère.
Avec la poésie inhérente à la naïveté du regard artistique face aux créatures et phénomènes naturels observés, ce laboratoire créatif se déploiera à la poursuite du sublime, des beautés contingentes et des preuves d’un absolu caché dans la nature. À l’ère du numérique, dans un monde désormais cartographié, rationalisé, et conscient de sa finitude, ce dispositif à la fois technologique et artisanal, numérique et physique, à la croisée des sciences, du naturalisme, du survivalisme et des cultures « makers », permettra la réinvention ou la réintroduction de sens et de liens entre la crise historique initiale, la renaissance biologique du site, et les crises modernes, présentes ou à venir de l’âge anthropocène.
Paul Duncombe est né en 1987 à Caen, en France, où il vit et travaille. Diplômé de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris en 2014, Paul Duncombe explore les différentes échelles du paysage. Ses recherches successives, sur les banquises du Labrador, les tempêtes en mer Celtique, les forêts boréales, ou encore les terres irradiées de Fukushima, mettent en relation la simplicité apparente des œuvres de la nature avec la technicité croissante des sociétés modernes. Du simple geste aux installations monumentales les plus complexes, ses travaux traversent les frontières et les disciplines, en s’appuyant sur des collaborations avec des spécialistes de tous horizons : biologistes, géologues, astrophysiciens, guides de haute montagne…multipliant ainsi les points de vue et les expériences. Il développe et expose ses projets en France : Centquatre, 63e Salon de Montrouge, Palais de Tokyo, Galerie Thaddaeus Ropac et à l’étranger : Unicorn Center for Art (Beijing), Coopérative Méduse (Québec), Kyoto Art Center (Kyoto).
« Éléonore Saintagnan a choisi pour point de départ de son projet original et cinématographique, un fait divers historique et sordide à la fois, largement méconnu en dehors de la Chine : la grande Campagne du Moineau, orchestrée par Mao en 1958, dont le résultat fut désastreux pour l’écosystème des campagnes chinoises. Nous avons voulu encourager ce projet de recherche sur les liens d’interdépendance entre les hommes et les animaux » a conclu Christine Germain-Donnat.
Cette mention spéciale du jury est assortie d’une résidence à la Fondation Camargo qui permettra à l’artiste de développer son projet. Située à Cassis, au bord de la Méditerranée, la Fondation Camargo, fondée par l’artiste et philanthrope américain Jerome Hill (1905-1972), encourage la créativité, la recherche et l’expérimentation grâce à son programme de résidences internationales pour artistes, chercheurs et penseurs.
« Nous sommes ravis de nous associer à COAL, en particulier pour cette mention spéciale décernée à Éléonore Saintagnan, dont le travail de recherche et de création sur le vivant est au coeur des préoccupations de la Fondation Camargo », Julie Chénot, Directrice des programmes de la Fondation Camargo, membre du jury.
LE PROJET MOINEAUX
En 1958, Mao Zedong entreprit une vaste campagne pour débarrasser la Chine de ses moineaux, accusés de voler aux hommes 25 000 tonnes de grains de riz par année. En observant le mode de vie de ces oiseaux, on s’aperçut qu’ils ne pouvaient voler plus de deux heures et demie d’affilée sous peine d’épuisement. Il fut donc décidé que, pendant trois jours, jeunes et vieillards, hommes et femmes, sortiraient dans la rue et dans les champs, armés de drapeaux, de gongs et de lance-pierres, pour détruire les nids, casser les œufs et empêcher les oiseaux de se poser. Dix millions d’oiseaux périrent lors de cette campagne, qui eut finalement l’effet contraire à celui escompté : l’année suivante, les insectes, dépourvus de leurs prédateurs, détruisirent la quasi-totalité des récoltes. Cet événement historique plutôt méconnu condense à lui seul les enjeux de la disparition des moineaux dont la population a chuté de 95 % en trente ans.
Avec Le projet Moineaux, Éléonore Saintagnan s’attache à créer une sorte de rituel carnavalesque destiné à expier nos fautes humaines passées et à rappeler, à travers un projet de recherche, les liens d’interdépendance entre les hommes et les moineaux. Un film mêlera des images tournées en couleurs et des archives en noir et blanc, reconstituant notamment la campagne de Mao Zedong. Cette fable cruelle nous parle de la folie des hommes à travers un exemple d’extermination particulièrement saisissant.
Lointain, cet épisode n’en résonne pas moins avec notre époque qui voit la disparition progressive et inquiétante des oiseaux et de la biodiversité en général. L’artiste agira aussi concrètement pour la préservation des moineaux à travers la réalisation collective d’œuvres et de nichoirs dans l’espace public et la mobilisation des jeunes et des artistes en lien avec des associations et des scientifiques, favorisant la réintroduction de l’espèce en ville.
Éléonore Saintagnan est née en 1979 à Paris, en France. Elle vit et travaille à Bruxelles en Belgique. Diplômée du Studio national du Fresnoy puis du master SPEAP de Bruno Latour à Sciences Po Paris, elle reçoit en 2010 le Prix du commissaire au salon de Montrouge. En 2018, son film Une fille de Ouessant est primé meilleur court-métrage à Visions du Réel (Suisse), puis elle gagne le prix Isère art contemporain doté d’une résidence à Moly-Sabata. Elle expose en France : CRAC Alsace, Palais de Tokyo, chez Néon à Lyon, Mains d’œuvres à Saint-Ouen, La Criée Centre d’art contemporain de Rennes, et à l’étranger : Wiels (Bruxelles), Galerie Elaine Levy (Bruxelles) ainsi que dans des festivals de cinéma comme le FID Marseille, Hors-Pistes au Centre Pompidou, ou DOC Fortnight au MoMA (New-York), MMCA (Séoul).
JURY 2020
DOTATION
Le lauréat du Prix COAL bénéficie d’une dotation de 10 000 euros, allouée par la Fondation François Sommer et COAL incluant une résidence au Domaine de Belval, propriété de la Fondation François Sommer. La Fondation François Sommer, reconnue d’utilité publique dès sa création le 30 novembre 1966, a été voulue par François et Jacqueline Sommer, pionniers de la mise en œuvre d’une écologie humaniste. Fidèle aux engagements de ses fondateurs, elle œuvre pour la protection d’une biodiversité où l’homme trouve sa juste place, pour l’utilisation respectueuse des ressources de la nature et le partage des richesses du patrimoine naturel, artistique et culturel. Une mention spéciale du jury assortie d’une résidence à la Fondation Camargo est également décernée en 2020 à l’un des dix artistes nommés.
PARTENAIRES
Le Prix COAL 2020 bénéficie du soutien de l’Union Européenne via le programme de coopération européenne ACT (Art Climate Transition), du ministère de la Transition écologique et solidaire, du ministère de la Culture, de l’Office français de la biodiversité, du musée de la Chasse et de la Nature et de la Fondation François Sommer, de la MGEN, de la Fondation Camargo et d’un partenariat avec le comité français de l’UICN.
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